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Repenser le coût des transferts pour booster l’apport en devises

Les transferts des Marocains résidant à l’étranger (MRE) se sont accrus de 3,4% à 62,2 milliards de DH, selon la dernière note de conjoncture du ministère de l’Economie et des Finances. Ils sont en progression par rapport à 2015 qui a enregistré une évolution positive de 3%  pour dépasser la barre de 60 milliards de dirhams s’établissant à 61,7 milliards de dirhams. Pourtant, nombreux sont les MRE qui estiment que ces transferts de fonds auraient pu être plus importants si leur coût moyen était plus abordable.

« Au Canada, il y a plusieurs sociétés de transfert d’argent (STA) vers le Maroc et chacune d’entre elles fixe son propre taux de change. A titre d’exemple, Wafacach  applique un taux de change du dollar canadien de 7,42 DH et Damancach le fixe à 7,52 DH. Pour sa part, le groupe financier coopératif Desjardins a signé une convention avec la Banque populaire permettant aux Marocains résidant au Canada et titulaires d’un compte BP de transférer quotidiennement 2.500 dollars pour la modique somme de 7 dollars », nous a indiqué Hamid Bennani, un MRE résidant au Québec qui juge, néanmoins, ces transferts d’onéreux. Même son de cloche chez Rachid Bakhoch, acteur associatif aux Pays-Bas. « Il faut payer 4,5 euros pour chaque 50 euros transférés. Et c’est très cher. Notamment avec le contexte de crise économique. En fait, beaucoup de MRE sont au chômage et les coûts des transferts les impactent lourdement », nous a-t-il expliqué.

Zahara qui réside en Arabie Saoudite considère elle aussi ces transferts comme fort chers. « Il faut débourser 33 riyals  saoudiens pour 500 riyals envoyés au Maroc via les STA. «C’est cher par rapport à d’autres pays comme l’Egypte, le Yémen et où ce montant est divisé par quatre », a-t-elle précisé.
D’autres Marocains du monde ont une autre vision sur ce sujet. Lahcen Hammouch, directeur de la radio et télévision Almouwatine à Bruxelles, nous a expliqué que le prix pratiqué pour les transferts d’argent reste correct et ne pose pas problème au niveau de la Belgique. « Beaucoup d’offres sont faites par les banques et certaines d’entre elles ont même proposé la gratuité des transferts. La concurrence a joué son jeu », nous a-t-il précisé.

De son côté, Hassan Raky, MRE d’Arabie Saoudite, nous a indiqué que le coût des transferts d’argent par les STA demeure correct et il souhaite l’ouverture de  banques marocaines sur le territoire saoudien.
Cependant, pareilles positions demeurent néanmoins peu répandues puisque nombreux sont les rapports internationaux qui ont indiqué que ces coûts sont exorbitants. Une étude de la Banque mondiale a précisé qu’au niveau international, le coût moyen des transferts a été de l’ordre de 200 dollars en 2015 et que l’Afrique subsaharienne demeure la région la plus chère, avec un coût moyen de 9,5 %. Idem pour la Banque africaine de développement (BAD) qui a indiqué, dans un rapport, que les coûts des transferts non bancaires pour un montant moyen de 300 euros s’élèvent à 29 euros pour Western Union,  23 euros pour MoneyGram et à 16,70 pour les mandats postaux express.
La cherté des coûts des transferts a-t-il eu un impact sur l’émergence de circuits informels ? « Il y a l’informel ou ce que l’on appelle le marché noir des devises. Mais cela ne concerne que les grosses sommes souvent transférées  via des intermédiaires (certains directeurs d’agences bancaires ou des présidents d’associations). On assiste même à du blanchement d’argent », nous a confié Rachid Bakhoch.
Pour sa part, Hamid Bennani, nous a indiqué que les circuits informels existent au Canada et s’adressent notamment aux Marocains qui travaillent au noir et qui redoutent d’éventuels contrôles inopinés du fisc canadien.  «  Certains MRE ne transfèrent  pas beaucoup d’argent via les circuits formels puisqu’ils ne veulent pas laisser de traces. On a entendu parler de pareilles pratiques également chez les étudiants marocains. Il y a des intermédiaires qui gèrent ces transferts entre les familles restées au Maroc et leurs enfants résidant au Canada », nous a-t-il précisé.

Pour la BAD, le Maroc reste immunisé contre de telles pratiques et  il est classé parmi les pays qui enregistrent un taux de recours au secteur informel relativement bas en raison principalement des bonnes performances de ses services bancaires, de la densité de ses réseaux de STA et du profil sociologique de ses citoyens en quête de discrétion.

La BAD a également souligné dans son rapport sur les transferts de fonds des migrants que le secteur bancaire de notre pays s’est intéressé depuis longtemps aux transferts de notre diaspora. A l’heure actuelle, sur la vingtaine de banques, quatre (toutes marocaines) se partagent 85 % du marché des migrants. La principale raison de leur succès est leur stratégie d’implantation ou de représentation directe dans les principaux pays émetteurs, dont ne disposent pas les autres banques africaines. Le deuxième facteur explicatif du succès des banques marocaines réside dans la diversité des services offerts aux Marocains du monde et qui vont au-delà des coûts des transferts pour inclure toute une gamme de prestations complémentaires (assurance, immobilier, placement, etc.). Les transferts sont ainsi devenus pour ces opérateurs un produit d’appel à bas coût destiné à attirer l’épargne à moyen et long terme des migrants à travers de packages dédiés.

« Les transferts des MRE représentent plus de 7% de notre PIB et occupent la troisième place au niveau des sources de rentrées de devises après le secteur touristique et les ventes de phosphates. Tout cela appelle donc les pouvoirs publics à revoir de fond en comble leur stratégie de maintien, voire le renforcement des liens avec notre diaspora qu’ils remettent au goût du jour chaque été, le temps des retours en vacances des MRE », a conclu Hamid Bennani.

31 Janvier 2017, Hassan Bentaleb

Source : Libération

SG au JT de 2m: spécial programmation de la journée internationale des migrants

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