Si la première journée a fait, samedi, le tour des pistes/itinéraires des voyages initiatiques et de la quête intérieure, le panel des animateurs de la Rencontre de dimanche, a évoqué le voyage dans les textes, religieux, profanes, mystiques, théâtraux ou encore musicaux.
Un exercice, pas du tout aisé, et auquel les animateurs se sont attelés chacun selon sa spécialité comme Maurice Arama, historien de l’art, qui a évoqué comment le peintre Eugen De La Croix exprimait par un trait de pinceau ce qu’il ne pouvait dire et traçait en lettres ce sur quoi son inspiration picturale butait.
Daniel Mesghich, metteur en scène, a levé le voile sur cette relation incontrôlable qu’il a avec les textes de Shakespeare et particulièrement la Pièce Hamlet qu’il a monté plusieurs fois. « Je ne sais si c’est moi qui vais toujours vers Hamlet ou c’est lui qui exerce sur moi cet attrait magnétique » avouera-t-il.
Dans le même sens la poétesse, philosophe et musicologue Danielle Cohen-Levinas n’a pas pu s’empêcher, en parlant de l’écriture de l’exil, de faire référence à « cette séduction exercée par l’écriture musicale et l’ambivalence entre le vocal et l’instrumental ».
Kenett Brown, anthropologue, a fait remarquer que dans tout acte de traduction « on opère un voyage vers d’autres cultures » alors que Jean Assman, archéologue et égyptologue, a entrepris une relecture, verbale et musicale, de l’oeuvre de Mozart « La flûte enchantée » en analysant les différentes sources dont s’est inspiré ce compositeur hors pair.
Les Rencontres de Fès se sont poursuivies lundi, toujours sous les imposantes branches du chêne du Musée Batha, par un autre voyage initiatique qu’est le pèlerinage.
Obligation canonique pour certains, acte de foi pour d’autres, marche collective ou individuelle vers un sanctuaire (Bouddhistes) ou encore errance sans but dans les déserts (indiens mexicains) autant de motivations qui poussent au pèlerinage que Maurice Halimi, avocat, élu local et président de la communauté israélite de Perpignan, considère comme le troisième angle d’un triangle aux côtés de l’exil et de l’exode.
Pour ce fonctionnaire international qu’est Robert Lanquar, le pèlerinage est la procession d’une caravane, qui avant son terme/but, offre déjà en route l’occasion de la méditation et du recueillement.
L’érudit bouddhiste Shnatum Seth considère lui le pèlerinage comme une marche sur les traces de Bouddha pour partager, ressentir ce qu’il a vécu, mais aussi pratiquer et se réaliser.
Effectivement, renchérit Max-jean Zins, chercheur spécialiste de l’Inde, il s’agit d’une marche qui a la double propriété d’être individuée « chacun marche comme il veut et il peut » et d’être non épuisante au contraire de la course.
Le chercheur marocain Mohamed Kenbib est revenu, lui, sur le pèlerinage des juifs en terre d’Islam et particulièrement au Maroc ou la marche vers les tombeaux des saints reste un mouvement continuel voire perpétuel.
Le réalisateur Ahmed Ferroukhi devait commenter son film « le Grand voyage » ou il a revisité le pèlerinage effectué par son père à partir du sud de la France.
Curé à Nazareth et patriote arabe de nationalité israélienne, Emile Shoufani s’est félicité de pouvoir faire ce pèlerinage d’Orient vers l’Occident qui lui permet » de sentir Fès et de découvrir sa beauté ». Et d’appeler pour le partage et la communion avec les êtres et pour placer la vie terrestre dans la réalité divine.
L’exil et le voyage mythiques sont les dernières thématiques programmées dans le cadre des Rencontres de Fès organisées dans le cadre du Festival des musiques sacrées du monde qu’abrite la capitale spirituelle du 4 au 12 juin.
Source : MAP
Publié le 08.06.2010