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Marrakech: La culture judéo-marocaine en partage

jeudi, 15 novembre 2018

Au programme de la deuxième journée de la rencontre de Marrakech sur le thème"Judaïsme marocain : pour une marocanité partagée", une première séance intitulée "séquence Jeunesse : Côte à côte, face à face, ensemble et séparément, comment construire l’avenir ?’’ a été organisée . La table-ronde a été animée par Mme Zhor Rehihil, conservatrice du Musée du Judaïsme marocain, M. Ariel Danan, historien, M. El Mehdi Boudra, membre fondateur de l’Association Mimouna, M. Kamal Hachkar, historien et cinéaste et M. Maxime Karoutchi, artiste et acteur associatif. M.A M. Aziz Rifki, chargé de mission au CCME a modéré cette rencontre.

Mme Zhor Rehihil : la culture judéo-marocaine, un patrimoine que l’on partage

Lors de son intervention, Mme Rehihil a exposé le travail "profond et acharné mené par la Fondation du patrimoine judéo -marocain et son Musée durant 20 ans " : "je considère que cette rencontre est le fruit de toutes les actions que nous avons entreprises".

« Depuis 1997 nous avons organisé plusieurs activités, notamment en France où s’est tenu un évènement inédit dans un lieu de culte musulman, la Mosquée Mohammed VI de Saint-Étienne en collaboration avec l’Alliance israélite universelle à Paris et plusieurs autres partenaires ».

« Ce que je peux en retenir, c’est que nous avons travaillé ensemble, Juifs et Musulmans, parce que nous partageons cette marocanité, que Simon Levi se plaisait à appeler en arabe « tameghrabit » », a confié Mme Rehihil remerciant à cette occasion M. Marbi Marchich, recteur de la mosquée de Saint-Etienne, pour son soutien.

La conservatrice du Musée du judaïsme marocain s’est également félicitée de travailler en étroite collaboration avec l’Union des Mosquées de France pour organiser des expositions sur le judaïsme marocain dans les écoles et les lieux de cultes musulmans, précisant qu’une exposition itinérante sur la culture judéo-marocaine se tiendra prochainement à Marseille et à Evry.

Le Musée du Judaïsme marocain, seule institution pour préserver cet héritage commun, soutient aussi les activités de plusieurs acteurs associatifs ou artistiques : " avec la Fondation Mimouna à l’Université Al Akhawayn d’Ifrane, nous avons préparé des contenus pour expliquer aux jeunes marocains la Shoah ou l’Holocauste. Le projet du film Tinghir Jérusalem de Kamal Hachkar s’est aussi ficelé en collaboration avec le musée » a-t-elle précisé.

Mme Rehihil a estimé que  l’intérêt pour la culture judéo-marocain est grandissant, en témoigne le nombre des demandes de soutien pour des projets universitaires et la curiosité des écoliers musulmans qui viennent visiter le musée et s’exclament presque toujours " mais c’est comme chez nous ». " C’est en effet une prise de conscience du patrimoine que nous partageons », a-t-elle conclu. 

M. Maxime Karoutchi : mémoires d’un Casablancais de confession juive

L’allocution de l’artiste Maxime Karoutchi a été riche en émotion : « feu Simon Lévy a su raviver en moi la flemme de la marocanité ». Pour ce marocain qui est né et a grandi dans la vieille médina de Casablanca, « le vivre-ensemble pour moi va de soi et rien ne nous départageait de nos voisins musulmans ».

« Je me rappelle que le four à pain de la medina, tenu par un musulman, fermait les vendredis pour s'occuper des mets des Juifs de la ville et que dans le patio ou nous vivions, ma mère me confiait à notre voisine musulmane pour aller faire les courses ». 

« Je n'ai appris que j'étais aussi juif en plus d'être marocain qu’à l’âge de 14 ans, j’entendis le mot juif pour la première dois de ma vie », s’est rappelé Maxime Karoutchi. « La politique étrangère a creusé un fossé entre nous ».

Pour prendre conscience de tout le patrimoine que nous avons en partage, Maxime Karoutchi appelle à l’occasion de cette rencontre les responsables à intégrer l’affluent juif dans les manuels scolaires : « notre histoire est restée aphone, les manuels scolaires sont restés aphones de notre patrimoine. Il y a des sportifs marocains de confession juive que nous devons tous connaître comme Max Cohen qui a combattu avec Marcel Cerdan et bien d'autres », a-t-il indiqué se rappelant que de son époque «  les premiers de la classe en hébreux étaient Musulmans ».

M. Kamal Hachkar : l'identité marocaine en pleine mouvance 

La mouvance qui caractérise nos identités se résume selon Kamal Hachkar dans la citation de Jean-Pierre Vernant, « pour être soi, il faut se projeter vers ce qui est étranger, se prolonger dans et par lui. Demeurer enclos dans son identité, c'est se perdre et cesser d'être. On se connaît, on se construit par le contact, l'échange, le commerce avec l'autre. Entre les rives du même et de l'autre, l'homme est un pont ».

Le réalisateur explique dans son propos les raisons pour lesquelles il s’est intéressé à la culture judéo-marocaine et à la réalisation de son documentaire ‘Tinghir-Jérusalem’. « Moi qui suis né à Tinghir de parents marocains musulmans et qui ai quitté le Maroc à l’âge de 6 mois pour rejoindre avec ma mère mon père ouvrier en France, j’ai aussi voulu questionner mon identité à travers la mémoire de l’autre ».

« Mon film n’était pas un récit historique mais voulait comprendre on survit à l'attachement de sa terre ? ». Après l’avoir réalisé, le cinéaste a décidé de s’installer au Maroc : «  J'ai voulu questionner la troisième génération d'immigrés qui est la mienne sur ce qui reste en nous de notre culture natale ». « J’ai réalisé ainsi que la langue, la darija et l’amazighe, sont ce lien indéfectible avec notre culture d’origine ».

M. Ariel Danan : faire connaître l'héritage judéo-musulman auprès des jeunes générations

M.Ariel Danan a commencé par évoquer son identité marocaine: "Pourquoi suis-je aussi attaché à cette identité marocaine alors que je ne suis pas né au Maroc? Il m'a fallu 25 ans avant de le rendre à Fès".

C'est grâce au Centre communautaire de Paris et  particulièrement à Raphy Marciano, que j'ai pû mettre des images sur ce qui m'a été raconté". 

M.Danan a ensuite affirmé que: "dans le cadre de mes activités professionnelles au sein de l'alliance israélite universelle, nous avons fait dons d'archives, car il n'y a rien de plus important que la recherche historique pour se connaître soi même" ajoutant  que cette recherche doit se traduire sur un plan pédagogique qui a nécessité beaucoup de travail".Il a poursuivi "Le week end que j'ai passé à la mosquée  m'a permis de partager avec des Musulmans venus nombreux, beaucoup d'entre eux rencontraient un marocain juif pour la première fois de leur vie". 

Pour terminer M.Danan a affirmé qu'il était nécessaire d'investir dans " les réseaux sociaux ou l'information est souvent biaisée. Il faut adapter cette culture aux nouveaux codes de communication".

M. El Mehdi Boudra : actions associatives pour promouvoir l'héritage en commun

M.Boudra a estimé que l'association Mimouna désirait à travers  ses activités renouer avec nos racines juives en organisant notamment la première   conférence dans le monde arabe sur l'holocauste et  faire valoir les principes universels humanistes et du vivre- ensemble auprès des jeunes générations.

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