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Mobilités et migrations au Maghreb

jeudi, 20 février 2014

Le premier espace débat du Conseil de la communauté marocaine à l'étranger (CCME) de ce jeudi 20 février 2014 accueille Mme Nabia Haddouche, professeur et experte du développement, MM. Mimoun Aziza, professeur d'histoire contemporaine, Mohamed Amattat, professeur d'histoire et Hamdi Yemen, spécialiste de l'histoire sociale et culturelle autour d'une ronde sous le thème : "mobilité, migration et échange au Maghreb".

M. Amattat a tracé la chronologie des migrations algériennes au Maroc. Une migration qui s'est déroulée en 4 étapes : "première étape, la grande migration en 1830. La France occupe l'Algérie. Les Algériens refusent de résider dans le pays du "kofr (la mécréance)", la plupart d'entre eux se dirigent vers Fès. Il faut dire que Maroc s'est montré accueillant envers cette communauté dont la plupart ont travaillé aux universités et mosquées marocaines, à Al Qaraouiyyine notamment.

Seconde étape, durant la période post-protectorat, c'est la migration des cadres et compétences. Beaucoup d'entre eux étaient naturalisés français et faisaient du commerce au Maroc. Ces cadres, maîtrisant le français et les dialectes régionaux étaient des intermédiaires entre les français et l'administration marocaine.

Troisième étape, pendant les années '40, les Algériens émigrent au Maroc pour une vie meilleure: c'est le début de la migration irrégulière. Puis vient la quatrième étape de cette migration, celle d'après 1956. L'Algérie est en guerre, 130.000 réfugiés algériens arrivent au Maroc et sont pris en charge avant que de l'ONU n'intervienne".

M. Aziza a précisé qu'il est question dans cette table-ronde des mobilités durant le colonialisme français puisque, dans cette région du Maghreb, les mobilités se sont réduites après l'indépendance des pays jusqu'à atteindre le degré zéro, où la communication avec le voisin devient impossible, donnant lieu à des phénomènes nouveaux comme la contrebande.

Dans son intervention M. Aziza a exposé les grandes lignes de la migration des Marocains en Algérie : " pendant le protectorat, l'Algérie représentera pour les Marocains un pays en pleine construction, surtout à l'Ouest. Les Marocains du rif y émigrent fuyant le manque de ressources et la sécheresse. Oujda a joué un rôle de relais, de transit de ces populations et le port de Melilla a revêtu un rôle important avec 3 ou 4 voyages par semaine vers Oran. Mais ce qui est important à retenir dans l'histoire de la migration marocaine est que cette migration en Algérie a propulsé les Marocains vers les pays de l'Europe".

Quant à Mme Haddouche, native de la ville d'Oujda, elle participe à cette table-ronde par le témoignage, le sien, d'un enfant dont la famille vivait au Maroc et en Algérie.
"Je sens toujours que ces frontières sont fictives, nous avons les mêmes habits, mêmes traditions, même langue et dialecte. De mon temps la journée se passait sur ces frontières, on passait d'une rive à l'autre sans papiers, tout déplacement était fluide", a déclaré Mme Hadouche.
"J'ai côtoyé les Algériens du Maroc à Oujda : disons qu'ils faisaient partie de la classe moyenne. Ils étaient presque tous éduqués, souvent médecins, pharmaciens ou professeurs. Lors de la révolution algérienne, Oujda a joué un rôle central : c'était la base des soldats algériens. A partir d'Oujda, les Algériens envoyaient de l'argent à leur pays", a-t-elle ajouté.

Après l'indépendance, les Algériens rentrent dans leur pays, quelques marocains les accompagnent pour saisir les occasions d'après la guerre. Mais, "1975, à la veille de la marche verte, les Marocains ayant émigré auparavant en Algérie sont expulsés vers le Maroc: 75% d'entre eux ont été pris en charge par leurs familles, les 25 % restant ont été ramenés à leurs villes d'origine. Nous retenons que dans le temps, l'Algérie n'a pas expulsé tous les marocains sur son sol : les femmes marocaines mariées aux responsables algériens, les riches marocains d'Algérie y sont restés", précise Mme Hadouche.

Concluant cette rencontre, M.Hamdi Yemen a expliqué la spécificité de la migration tunisienne, notamment vers le Maroc pendant le colonialisme français.
"Les Tunisiens n'ont pas émigré autant que les Marocains, ils avaient peur de l'Occident (l'Algérie occupée par la France).

Mais le Maroc était pour les tunisiens une destination mystérieuse, souhaitée, l'origine des chorfas (nobles) et aristocrates", soutient M. Yemen, ajoutant que "lors de la révolution du rif, la France a recruté des Tunisiens pour combattre auprès de l'armée française au Maroc, mais une fois au Maroc, les Tunisiens s'enfuient et se remettent du côté marocain".

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