Une étude française récemment publiée révèle qu’environ 15 000 jeunes diplômés des écoles d’ingénieurs et de gestion françaises choisissent chaque année de débuter leur carrière à l’étranger, alors que l’État a investi près d’un milliard d’euros dans leur formation.
Selon une étude statistique réalisée par la fédération « Syntec », qui regroupe plus de 3000 entreprises françaises spécialisées dans les métiers de la technologie, de l’ingénierie et du conseil, et l’institut « Ipsos », 10 % des diplômés des écoles d’ingénieurs et 15 % des diplômés des écoles de gestion françaises choisissent d’émigrer à l’étranger, représentant une augmentation de 23 % au cours des dix dernières années, ce qui constitue « un risque structurel pour l’innovation et la compétitivité en France », affirme la fédération.
L’étude, qui a porté sur un échantillon de 1 000 personnes hautement qualifiées, parmi lesquelles des actifs et des étudiants titulaires d’un diplôme bac + 5 ans ou plus, a montré que le taux de fuite des cerveaux augmente avec le niveau de qualification atteignant 19 % en 2024 pour les diplômés de l’Institut polytechnique et 17,4 % en 2022 pour ceux de l’École centrale de Paris.
D’autre part, 57 % des personnes interrogées ont exprimé leur souhait d’émigrer au cours des trois prochaines années, les destinations les plus prisées étant le Canada (29 %), la Suisse (22 %), les États-Unis (17 %) et l’Allemagne (16 %).
Bien que la France dispose d’atouts solides pour attirer des compétences hautement qualifiées, tels que l’environnement de travail, la protection sociale et le mode de vie, l’étude souligne l’existence d’« obstacles structurels » qui limitent la capacité de la France à retenir ces compétences. « Près de la moitié des personnes interrogées considèrent que le système fiscal représente un fardeau pour elles, tandis que 44 % estiment que les salaires nets sont insuffisants et 32 % que le marché du travail est rigide ». En outre, 70 % des talents interrogés estiment que la France est en déclin, 74 % se disent préoccupés par la situation économique et 81 % par la situation politique.
Face à cette réalité, la fédération « Syntec » a appelé à une action rapide et coordonnée pour contrer le risque de perte de compétences, soulignant que « la question ne se limite pas à attirer les talents, mais concerne avant tout la création de conditions favorables à leur maintien et à leur retour ». Elle propose « d’alléger les charges fiscales et sociales pesant sur les compétences hautement qualifiées afin que leurs conditions de travail en France soient similaires à celles de leurs voisins européens, et de revaloriser dans le débat public le rôle des professions scientifiques, techniques et administratives dans la prospérité du pays ».
La méthodologie de l’étude reposait sur la combinaison de l’analyse des données disponibles sur l’émigration des jeunes diplômés, d’une enquête menée auprès d’un échantillon de personnes résidant en France et ayant un niveau d’études supérieur (bac + 5 et plus), ainsi que d’une étude qualitative basée sur vingt-cinq entretiens en ligne avec des étudiants et des travailleurs hautement qualifiés.