Alors que l’opposition tire à boulets rouges sur le gouvernement et que le malaise s’installe désormais dans les rangs de la majorité, une commission parlementaire a achevé mercredi ses auditions sur le port de la burqa, un des aspects du vaste débat qui agite le pays.
Devant les députés, le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux a estimé qu’il fallait interdire le voile islamique intégral dans les services publics, y compris par la loi, c’est-à-dire à la Poste, dans les préfectures, aux abords des écoles et dans les transports en commun. Le texte s’appuierait sur la nécessité pour chaque citoyen ou citoyenne d’être identifiable.
« La naturalisation, c’est-à-dire l’entrée dans la communauté nationale, ne me paraît pas souhaitable » pour les femmes intégralement voilées et pour leur mari, a-t-il ajouté.
Le président du groupe UMP (majorité de droite) à l’Assemblée nationale, Jean-François Copé, a jugé « indispensable » une loi pour interdire ce voile intégral porté par quelque 1.900 femmes en France, selon des chiffres officiels révélés mercredi.
Le responsable de la droite au pouvoir a cependant assuré que le débat sur le voile ne visait en aucun cas l’immigration ou la liberté religieuse.
Ces précautions sont à la mesure de l’embarras suscité par la grande concertation publique sur l’identité nationale lancée le 25 octobre par le gouvernement et qui tourne, selon l’opposition, à la « stigmatisation » des 5 à 6 millions de musulmans vivant en France.
Les débats organisés à travers le pays ont déjà donné lieu à des dérapages racistes.
Au cours de l’un d’eux lundi soir, la secrétaire d’Etat à la famille Nadine Morano avait soulevé une nouvelle controverse en exigeant des jeunes musulmans français qu’ils se sentent français, trouvent un travail et cessent de porter leur casquette à l’envers, l’un des signes vestimentaires de ralliement dans les banlieues.
Dès mardi, l’ancien ministre et élu UMP (droite) François Baroin a demandé la suspension d’un débat qui pourrait « flatter les bas instincts » et « faciliter les amalgames et les confusions ». Enfonçant le clou, l’ex-Premier ministre et rival de Nicolas Sarkozy Dominique de Villepin a appelé à « arrêter » un « mauvais débat » qui « n’a pas de sens ».
Le quotidien Le Monde a appuyé ces appels, estimant que le président français « s’honorerait d’admettre son erreur » et de « la corriger ». « L’affaire a été trop vite mal engagée et de manière si biaisée que chacun mesure les dégâts très sérieux qu’elle produit », a-t-il jugé.
Mais Nicolas Sarkozy a de nouveau justifié l’organisation de ce débat mercredi soir. « C’est un débat particulièrement noble, et cela évitera d’avoir des impasses comme celle qui a eu lieu en Suisse sur la question des minarets », a-t-il déclaré au cours d’une interview sur la chaîne Canal +.
« Est-ce qu’il y a un problème d’intégration aujourd’hui dans notre pays ou est-ce qu’il n’y en a pas? Est-ce que c’est moi qui invente la ghettoïsation dans certains quartiers de nos villes, la montée d’une forme de racisme dans d’autres, la violence, l’absence de diversité dans les élites françaises? », a-t-il interrogé.
D’abord accusé d’aller opportunément chasser sur les terres de l’extrême droite avant une échéance électorale, les régionales de mars, le gouvernement est suspecté par des associations de nourrir la division nationale.
AFP