vendredi 3 mai 2024 10:21

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Lettre ouverte à mes enfants anglo-francais

Mes chers Sarah, Laura, Emilie et Benjamin, Je sais à quel point vous êtes fiers de votre nationalité française. Et en même temps d’être anglais. Vous êtes tous nés en France ou Suisse romande. Votre mère est française et fière de l’être. Son propre père est vietnamien, mais sa formation à l’école des Ponts et Chaussées après la guerre a fait de lui quelqu’un nourri de la culture française. Lui aussi était patriote de son pays natal.

Il aurait pu partir en 1975 avec son épouse, votre grand-mère, une Bretonne enseignant le français au lycée de Saïgon. Par amour de son pays, Papy a choisi de rester au Vietnam. Par haine de son patriotisme, les communistes vietnamiens l’ont envoyé dans un goulag de "rééducation" pendant quatre ans avant qu’il puisse rejoindre votre grand-mère pour servir la France en travaillant à la SNCF.

Vous étiez encore petits quand on a déménagé en Angleterre, lorsque j’ai été élu député pour la première fois en 1994. Votre grand-mère écossaise-irlandaise était bien contente de vous avoir un peu plus près d’elle. Vous n’avez pas connu mon père, jeune officier de l’armée polonaise qui avait reçu une balle nazie dans l’épaule en 1939.

Ayant rejoint l’armée polonaise en Ecosse, il est mort à 42 ans d’une maladie liée à ces blessures. Il a combattu pour la liberté européenne et contre la politique d’avant-guerre de pureté raciale et nationale.

Votre mère et moi avons tout fait pour assurer que votre héritage français aille de pair avec votre culture anglaise. Nous vous avons envoyés dans une école en France et toutes nos vacances se sont passées chez vos grands-parents. Je suis fier que vous soyez tous français et british.

Aujourd’hui, une femme politique française veut vous nier le droit d’avoir cette double nationalité. Marine Le Pen a écrit à tous mes homologues à l’Assemblée nationale, les invitant à se rallier à sa cause. Son propre père n’a jamais lutté contre le nationalisme et le racisme. Au contraire, sa vie a été consacrée à les promouvoir. Il y a vingt ans de cela, Jean-Marie Le Pen avait déjà proposé la fin de la double nationalité en France. Maintenant, sa fille a repris le flambeau. Nicolas Sarkozy et

David Cameron ainsi qu’Angela Merkel ont tous récemment conspué le multiculturalisme. Ces assauts, tout comme l’attaque contre la double nationalité, font partie de la nouvelle politique de populisme identitaire. Leur rêve serait de vivre dans une nation sans différences culturelles ni ethniques.

Mais, même à gauche, on semble parfois s’orienter vers un rejet de l’étranger. En Grande-Bretagne, certains travaillistes voient l’immigration comme la raison de la défaite du Labour l’année passée. En France, une certaine gauche isolationniste réclame la «démondialisation», ce qui ferait également les affaires de tous ceux qui souhaitent interdire l’exportation des fromages, du foie

gras et des films français. Cette incitation à la peur de l’étranger est de plus en plus répandue en Europe.

Mes amis juifs ont toujours été accusés de double loyauté dès lors qu’ils exprimaient leur solidarité avec Israël. Jeune, j’ai souvent entendu ma grand-mère et ma famille irlandaise blâmer l’Angleterre - mon pays de culture sinon de sang - pour tous les maux qui accablaient alors l’Irlande. Vous, mes enfants, vous avez le sang d’au moins quatre nations dans vos veines. Vous avez deux nationalités.

Que la France se lève et dise non au fascisme light qui prêche la pureté nationale et honnit un monde qui, en dépit de tous ses problèmes et défis, est bien plus libre, plus ouvert et plus tolérant que le monde que j’ai connu à votre âge ! Votre grand-père paternel n’a pas eu la chance de voir ses petits-enfants à cause d’une balle nationaliste raciste qu’il a reçue il y a soixante-douze ans.

Aujourd’hui, les héritiers de son ennemi veulent interdire votre droit d’être français et anglais en même temps. J’espère que leurs idées ne passeront pas

7/6/2011, Denis MacShane Député travailliste et ex-ministre britannique des Affaires européennes

Source : Libération.fr

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